Nous nous sommes
retrouvés à Crest 2001 dans la Drôme pour la semaine fédérale de cyclotourisme. 13
000 inscrits. Cela va faire du monde sur les routes !
Le samedi, nous
nous sommes promenés dans la ville. Nous avons cherché nos repères : les
courses, les loisirs, les visites, l’organisation, les circuits, les amis, les
marchands…
Le dimanche,
j’ai participé à la montagne ardéchoise. 150 km dans une région très
agréable que nous avions déjà parcouru pendant la première semaine CCI. Le
matin, j’ai roulé avec un coureur UFOLEP d’un bon niveau. Il faisait le parcours
en se baladant. Moi, parfois, j’étais dans le rouge surtout qu’il me manquait
l’entraînement de montagne…
Lundi, 140 km :
c’était la Provence et au loin le Ventoux. J’ai roulé avec Jean Guy,
Philippe et Raoul, les membres de mon club mais d’une manière désordonnée.
Pendant ce temps, Doro et les enfants sont allés visiter la tour de Crest, voir
une exposition puis ils sont allés à la piscine l’après-midi.
Mardi, nous
avons pédalé en famille sur le petit circuit. Florian a dépassé les 60 km ce
jour là. Lui aussi était en forme. Il doublait des cyclotouristes dans les côtes.
Beaucoup l’encourageaient. Il adorait cela ! Le midi, au point d’accueil, il y
avait vraiment beaucoup de monde. Alors, nous sommes retournés dans la petite
ville et nous avons fait nos courses chez une épicière. Elle nous a proposé son
jardin au bord d’une rivière pour notre pique-nique !
Mercredi, 150 km
dans l’Ardèche avec des portions très sportives sur les portions plates.
Dans ces moments-là, il ne faut pas gaspiller ses forces mais plutôt gérer
l’effort pour pouvoir durer ! Le matin, j’avais roulé avec Philippe.
Jeudi, il ne
faisait pas beau. Nous sommes allés pique-niquer avec Jean-Guy et Isabelle et
leurs trois enfants. Les sorties familiales avec plein de mômes, c’est vraiment
sympa !
Vendredi 10
août, c’était une grande sortie dans le Vercors. 200 km. Au programme,
l’ascension du col de Rousset et la Combe Laval.
J’ai bien nettoyé
mon vélo. J’ai changé les pneus par sécurité, l’avant était usé et l’arrière
avait une section de 30 pour porter Clément sur le siège. Je me suis allégé car
je veux bien grimper les cols. J’hésite un peu pour le casque et puis je me dis
qu’il risque de faire chaud et qu’il va m’embêter dans les montées alors je le
laisse dans la voiture.
Je suis parti tôt.
Quand je suis arrivé à la restauration, Raoul, lui était sur le départ.
Dans la montée vers
Die, la route était agréable. Il faisait frais. Le soleil pointait son nez. Je
me suis arrêté un court instant au ravitaillement car je savais que la journée
allait être longue.
Dans l’ascension du
col de Rousset, je me suis fait doubler par six cyclotouristes sportifs. J’ai
changé de rythme et j’ai intégré ce groupe. Nous avons monté à 16 à l’heure.
Le
col est tout en lacet. Le vent était très violent. Je m’abritais comme je
pouvais dans un sens et nous récupérions dans l’autre sens. Mon altimètre me
renseignait sur le dénivelé restant à gravir.
Au col, nous avons
mis notre coupe-vent : le panorama est magnifique mais le vent était très froid.
Nous nous sommes engouffrés dans le tunnel et bien sûr de l’autre côté, cela
ressemblait à l’hiver : c’est une caractéristique du col de Rousset. Il y avait
du brouillard. J’ai descendu avec Raoul en récupérant du gros effort que je
venais de faire.
Le Vercors est
rude. Je voulais faire le grand parcours
pour revoir des paysages déjà admirés lors de mes voyages avec Dorothée.
Les cyclotouristes qui font
ces parcours sont des randonneurs. Ce sont des gens qui roulent
régulièrement à allure soutenue. C’est l’entraînement qui permet cela.
La montée qui nous
attendait devait être difficile : par le pourcentage et par le moment (en pleine
digestion) mais en haut, le panorama devait être la récompense.
J’ai laissé partir
Raoul. C’est bon pour le moral. Pendant ce temps, je suis resté pour me laver au
robinet. J’ai l’impression de repartir à neuf quand je fais cela. J’avais une
petite gêne au genou gauche et l’eau froide m’a fait du bien.
J’ai monté à mon
rythme vers le col de Gaudissart. J’ai attendu à la
Combe Laval. Je me suis imprégné du paysage.
Le vent était froid alors j’ai
décidé de monter jusqu’au col de la Machine. Là, Raoul est arrivé avec le
sourire et ravi d’avoir fait ce circuit.
Nous nous sommes
ravitaillés. Le
plus dur était derrière nous et il nous restait une soixantaine de kilomètres
pour rejoindre Crest.
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Trou noir.
Je suis étendu sur
le bas côté en position de sécurité. Il y a quelqu’un qui est agenouillé
derrière moi et qui me soutient…
Ma tête me brûle.
Ma conscience revient par bride.
- Qu’est ce qui
c’est passé, qu’est ce je fais là ?
- Vous avez eu un
accident. Mon fils vous est rentré dedans. Je suis son père. Je suis pompier.
Les secours arrivent…
Je suis pris de
terribles tremblements. J’arrive à me détendre.
Un photographe me
demande :
- Vous pouvez me
dire votre nom, votre âge.
Je lui donne les
réponses. Je cherche dans ma mémoire. Semaine fédérale. Vélos. Camping C2.
Emplacement 365 peut être. Dorothée et les enfants. Numéro de portable. Il prend
note.
- Je vous remercie
de m’occuper de moi.
Je sens dans mon
cerveau une brutale hémorragie qui m’inonde et qui m’étourdit.
Les pompiers
arrivent. Transport dans une coque. Masque à oxygène que je ne supporte pas.
Quelques kilomètres plus loin, arrêt. Ils m’informent que l’hélicoptère arrive
avec deux médecins à son bord pour m’acheminer à Valence. Tout va très vite.
Aux urgences, je
passe un scanner. Puis je suis transporté à la radiologie pour vérifier l’état
de la colonne vertébrale et la clavicule.
Le neurologue vient
me voir. « Il faut vous opérer ».
(Traumatisme
crânien, fracture temporal-occipitale droite et du rocher droit, hématome extra-dural temporal basal droit avec contusion frontale gauche et hémorragie
méningée pariétale gauche – fracture de la clavicule : c’est ce qui est inscrit
sur le certificat médical initial !).
Une infirmière
arrive avec un téléphone. « C’est votre femme ». Je l’informe mais je dois avoir
une voix un peu lointaine et cela ne rassure pas Dorothée…
Je suis emmené au
bloc opératoire. L’anesthésiste se présente.
Trou noir.
Dix jours d’hôpital
où je vais reconquérir petit à petit une partie de mes moyens. Dorothée me
soutiendra pendant cette période difficile. Elle dort dans un hôtel à Valence.
Comme d’habitude,
elle a tout organisé. Avec l’aide de nos amis Jean Guy et Raoul, les enfants, la
voiture et le vélo ont été remontés à Villiers. Puis c’est Olivier, Roselyne et
Mamie qui ont pris en charge nos gamins.
Le mercredi 22
août, nous avons quitté l’hôpital de Valence en ambulance.
Le lendemain, j’ai
retrouvé mes enfants. Au début, ils ont été impressionnés par la nouvelle
coiffure (tondue) de leur papa !
Depuis, j’ai eu le
témoignage de sympathie de nombreuses personnes et cela m’a vraiment beaucoup
touché. Si j’ai écrit ce récit c’est pour me rassurer et les rassurer également.
Au début, j’avais du mal à trouver mes phrases (idées et structure).
Les spécialistes
n’arrêtent pas de dire que je reviens de loin…
Cela fait un mois
que je suis tombé et je viens de commencer la rééducation de mon épaule. La
clavicule se ressoude mais il y a une proéminence qui me gêne. La paralysie
faciale est encore importante sur le front mais j’ai retrouvé deux rides. Je
suis encore à moitié sourd d’une oreille mais il y a eu des progrès ce qui
vaudrait dire que le nerf n’est pas coupé. J’ai encore du mal à ouvrir la
bouche. J’ai une grande cicatrice autour de l’oreille. Le cerveau va assez bien.
J’arrive à réfléchir malgré les médicaments qui m’endorment un peu. J’ai des
problèmes d’équilibre mais assez faibles.
Tous les jours, je
fais une balade. Elle est de plus en plus longue.
Ma voisine vient de
rentrer de la maternité. Elle vient d’avoir deux jumelles. La vie continue !!!
Daniel Clerc |