Les
habitudes
Julius Kuhl (Psychologue)
Les habitudes sont une excellente chose
: sans elles, nous aurions du mal à venir à bout du quotidien.
Comment elles se mettent en place : les habitudes résultent de l'exercice,
de la répétition.
Dans un premier temps, quand les
successions de mouvements sont nouvelles, il faut les diriger, les
contrôler de façon consciente.
Plus on les répète, plus elles
s'automatisent.
Cela va de séquences toutes simples
jusqu'à des processus extrêmement complexes.
Un exemple : se brosser les dents
C'est le cerveau qui dirige toutes les
activités conscientes mais cela demande beaucoup d'énergie.
Voilà pourquoi le cerveau transfert les
activités routinières, comme se laver les dents, vers le cervelet.
Le brossage s'y déroule de façon
inconsciente.
Nous sommes, en quelque sorte, sur
pilote automatique ce qui laisse beaucoup de place et de temps au
cerveau pour s'occuper de choses complexes comme, par exemple, la
planification des achats, le travail ou les loisirs.
Caro Matzko, Gunnar Mergner :
Mais que se passerait-il si nous ne
disposions pas de cette magnifique répartition du travail ?
Julius Kuhl (Psychologue)
Nous serions tout le temps occupé par
des processus très simples.
Il faudrait contrôler de manière
consciente comment nous nous brossons les dents, dans quel ordre
nous enfilons nos vêtements et nous n'aurions plus la possibilité de
réaliser des opérations complexes.
Ce qui fait que le cerveau humain
n'aurait jamais atteint le degré d'intelligence qui est le nôtre.
Nous serions au même stade que les
êtres vivants simples comme les reptiles, par exemple.
Caro Matzko, Gunnar Mergner :
Du point de vue scientifique, qu'est ce
une habitude ?
Service de la recherche sur le
cerveau à l'université de Brême
Professeur Gerhard Roth (Neurologue)
Les habitudes sont des processus
mentaux émotionnels ou moteurs , que nous réitérons souvent, et qui
représentent une économie pour le cerveau parce que nous les avons
répétés.
Caro Matzko, Gunnar Mergner :
Par rapport à nos activités
quotidiennes, quel est donc le pourcentage des habitudes ?
Professeur Gerhard Roth (Neurologue)
Au moins 99.99 %
Pratiquement tout ce que nous faisons
relève de l'habitude et notre cerveau se concentre sur de petits
ilots de traitements conscients : qu'il s'agisse de motricité, de
sentiments ou de pensées.
Quand nous agissons volontairement, en
y réfléchissant, nous le faisons avec le cortex, notamment avec le
lobe frontal.
Mais quand la chose se répète, le
processus se déplace lentement depuis cette écorce cérébrale vers le
fond du cerveau.
Cela représente une économie mais le
processus devient plus difficile à modifier.
C'est l'inconvénient de la chose.
Caro Matzko, Gunnar Mergner :
Qu'est ce qui fait qu'il est si
difficile de changer une habitude ? C'est vraiment très compliqué
d'aller la chercher au fond de son cerveau ?
Professeur Gerhard Roth (Neurologue)
Bien sûr que c'est difficile parce que
développer une habitude cela suppose que dans le cerveau des réseaux
deviennent plus petits, plus rectilignes, plus figés.
A ce moment là, ça marche comme sur des
roulettes, mais c'est aussi plus difficile à détricoter.
C'est là toute la difficulté car ce
sont des réseaux qui résistent même aux interventions du lobe
frontal.
Professeur Marcus Roth (Psychologue)
Il y a des gens qui recherchent
toujours la nouveauté. Qui ont besoin de repousser les limites.
Ceux qu'on appelle en psychologie les
amateurs de sensations fortes.
Routinier ou amateur de sensations
fortes, c'est essentiellement une question de chimie.
Dans le cerveau de Rafael, un
neurotransmetteur, la dopamine, est particulièrement élevé d'où un
surplus d'énergie, il a donc, sans arrêt, besoin de nouvelles
stimulations sinon il s'ennuie.
Chez le routinier, en revanche, le
neurotransmetteur le plus actif est la sérotonine qui freine
l'activité. Il faut moins de nouveautés à Claudia pour faire son
bonheur.
Caro Matzko, Gunnar Mergner :
Défaire ce qui est profondément ancré
dans la pensée et les sentiments demande beaucoup de temps et de
patience.
Plus une habitude est enfoncée loin
dans le cerveau, plus il est difficile de l'en déloger.
Xenius
(Arte)
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